Les principes généraux de la gestion des matières et déchets radioactifs
Au niveau européen
Le Conseil de l’Union européenne a adopté une directive le 19 juillet 2011 établissant un cadre communautaire pour la gestion responsable et sûre du combustible usé et des déchets radioactifs depuis leur production jusqu’à leur stockage.
Cette directive couvre toutes les étapes de la gestion du combustible usé et des déchets radioactifs résultant d’activités civiles. Chaque État membre est responsable en dernier ressort de la gestion du combustible usé et des déchets radioactifs produits sur son territoire.
La directive prévoit que chaque État membre établisse et maintienne un cadre prévoyant l’élaboration de programmes nationaux pour la gestion du combustible usé et des déchets, l’octroi d’autorisations, la réalisation d’inventaires, de mesures de contrôle et d’inspections, de mesures d’exécution telle que la suspension de l’exploitation, la répartition des responsabilités, l’information et la participation du public et le financement de la gestion des déchets. En outre, la directive prévoit que chaque État membre institue et maintienne en place une autorité de réglementation compétente pour la gestion du combustible usé et des déchets radioactifs, certaines conditions étant fixées pour garantir son indépendance.
Au niveau national
La France a défini et mis en oeuvre une politique publique en matière de déchets radioactifs, dans un cadre législatif établi en 1991 (loi du 30 décembre 1991) et consolidé en 2006 (loi du 28 juin 2006). Ces textes sont codifiés dans le Code de l’environnement.
Conduite par la Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) au sein du ministère de la Transition écologique et solidaire, cette politique comporte trois piliers :
- un Plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs (PNGMDR), mis à jour tous les trois ans par l’État et fixant un programme de recherches et de réalisations, assorti d’un calendrier ;
- des dispositions en matière d’évaluation indépendante des recherches, d’information du public et de dialogue avec l’ensemble des parties prenantes ;
- la garantie de la disponibilité des financements nécessaires : en vertu de l’article L. 110-1 du Code de l’environnement, selon lequel « les frais résultant des mesures de prévention, de réduction de la pollution et de lutte contre celle-ci doivent être supportés par le pollueur », c’est au producteur du déchet d’en financer la gestion, y compris à long terme.
La loi française
L’article L. 541-1 du Code de l’environnement pose comme principes la prévention ou la réduction de la production de déchets, la responsabilité des producteurs jusqu’à l’élimination de leurs déchets, la traçabilité et la nécessité d’informer le public.
Le Code de l’environnement indique que « la gestion durable des matières et des déchets radioactifs de toute nature, résultant notamment de l’exploitation ou du démantèlement d’installations utilisant des sources ou des matières radioactives, est assurée dans le respect de la protection de la santé des personnes, de la sécurité et de l’environnement » (article L. 542-1).
De nombreuses dispositions sont mises en oeuvre pour respecter ce cadre législatif :
- des prescriptions concernant le traitement et le conditionnement, le transport et les installations : elles sont définies par les autorités compétentes, qui en contrôlent ensuite l’application ;
- des modalités pour réduire le volume et la nocivité des déchets ; pour les déchets produits, des opérations de tri, de traitement, de conditionnement et de caractérisation du contenu radiologique : elles sont définies et mises en oeuvre par les producteurs de déchets. Des études de recherche et développement sont souvent nécessaires et sont menées par différents organismes, en particulier par le CEA ;
- la conception et la réalisation d’installations d’accueil avec le niveau de sûreté requis. Il s’agit soit d’entreposage (solution temporaire) qui relève en général de la responsabilité des producteurs de déchets, soit de stockage (solution définitive) dont la responsabilité incombe à l’Andra ;
- des opérations de transport et de mise en entreposage ou en stockage, incluant les aspects de suivi et de surveillance, y compris à long terme pour les stockages ;
- des dispositions destinées à informer le public.
Le contrôle des matières nucléaires
Compte tenu de son industrie nucléaire et consciente de ses responsabilités en matière de non-prolifération, la France s’est dotée d’une réglementation et d’une organisation dans le contrôle des matières nucléaires. Cette réglementation porte aussi bien sur les matières civiles que sur celles relevant de la défense nationale.
Sur le plan national, la protection et le contrôle des matières nucléaires font l’objet d’une réglementation spécifique qui relève du Code de la défense et des textes réglementaires associés.
Les matières nucléaires retenues dans la législation française sont au nombre de six : le plutonium, l’uranium, le thorium, le tritium, le deutérium et le lithium 6 (article R. 1333-1 du Code de la défense, le deutérium et le lithium 6 ne sont pas radioactifs). Leur définition fait l’objet d’examens périodiques en fonction du développement des connaissances et des techniques. Seuls le plutonium, l’uranium et le thorium sont considérés dans l’Inventaire national.
Cette réglementation vise à prévenir les risques de perte, de vol ou de détournement de matières nucléaires, ainsi qu’à protéger ces matières et les installations ou transports associés contre les actes de malveillance.
Dans ce cadre, la réglementation impose aux opérateurs et aux industriels détenant ces matières un certain nombre de dispositions qui se complètent mutuellement, telles que :
- des mesures de protection physique pour protéger les matières contre la malveillance et le sabotage par la mise en place de barrières et autres dispositifs entre le domaine public et les locaux où sont détenues les matières ;
- des mesures de suivi des matières qui permettent de connaître à tout moment la localisation et l’usage des matières ;
- des mesures de comptabilité afin de connaître à tout moment les quantités exactes de matières détenues. Chaque opérateur doit détenir sa propre comptabilité matière qui est comparée régulièrement à une comptabilité centralisée tenue par l’IRSN. Par exemple pour le plutonium et l’uranium, la comptabilité est tenue au gramme près ;
- des mesures de confinement pour prévenir les mouvements de matières non autorisés ;
- des mesures de surveillance qui ont pour but de garantir l’intégrité du confinement et de vérification de l’absence de sortie de matières par des voies illicites.
La détention des matières par un opérateur nécessite une autorisation préalable par l’autorité compétente qui est en France le haut fonctionnaire de Défense et de sécurité du ministère en charge de l’énergie. Cette autorisation n’est délivrée qu’après analyse d’un dossier fourni par l’opérateur en matière de protection physique, suivi, comptabilité, etc. Cette analyse est effectuée par l’IRSN qui agit en support à l’autorité ministérielle.
L’attribution de l’autorisation nécessite la réalisation par l’opérateur d’une étude de sécurité visant à évaluer l’efficacité et la pertinence du dispositif de protection à l’égard de menaces de référence définies par les pouvoirs publics. Les menaces sont réévaluées périodiquement par les services spécialisés de l’État pour tenir compte de l’évolution du contexte national et international.
Sur le plan international, les contrôles du respect de l’accord du traité de non-prolifération et du traité Euratom sont exercés respectivement par l’AIEA et par les services de la Commission européenne. Ces contrôles portent d’une part sur la déclaration et le suivi des mouvements de matières nucléaires (plutonium, uranium et thorium) entre pays, d’autre part sur les déclarations de flux et de stocks de matières détenues au niveau national pour les matières nucléaires qui ne relèvent pas des matières affectées au besoin de la défense nationale. Ces contrôles internationaux se traduisent sur les installations françaises par des inspections menées par des inspecteurs d’Euratom et dans une moindre mesure de l’AIEA (accord trilatéral entre l’AIEA, Euratom et la France).